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Déchets à risques infectieux, la filière sur le fil

Avec la pandémie de Covid-19, les unités de traitement des déchets d’activité de soins à risque infectieux (DASRI) tournent à plein régime. Pour que la filière joue pleinement son rôle, les autorités sanitaires ont dû faire preuve de souplesse sur les délais légaux de traitement. 

De prime abord, il ne s’agit que de boîtes en plastique, plus ou moins grandes, dans lesquelles les professionnels de santé déposent leurs déchets de soins. Seringues, compresses, objets souillés par le sang… Tout y passe. Derrière ce simple geste, une filière parallèle de gestion des déchets se met en branle pour traiter les DASRI (Déchets d’Activité de Soins à Risques Infectieux). Dans cette catégorie bien particulière, on trouve tout déchet – même du quotidien – ayant été utilisé dans un cadre médical. Le code de la santé publique intègre aussi dans cette catégorie les « matériels et matériaux piquants ou coupants destinés à l’abandon, qu’ils aient été ou non en contact avec un produit biologique, produits sanguins à usage thérapeutique incomplètement utilisés ou arrivés à péremption, déchets anatomiques humains, correspondant à des fragments humains non aisément identifiables ». Reconnaissables à leur couleur jaune et au pictogramme de risque biologique floqué sur leur flanc, les conteneurs et bacs de DASRI suivent un parcours dédié, étanche du flux des déchets ménagers classiques. Depuis mars 2020 et le début de la crise sanitaire, le défi des transporteurs et unités de traitement a été de tout prendre en charge dans les délais fixés par le code de la santé publique. 

Volume maîtrisé dans le Trégor

Depuis 2018, les déchets issus d’activités de soins du Trégor sont traités à Pluzunet (Côtes-d’Armor), chez Valorys. Derrière une porte dont les écriteaux annoncent : « Danger, risque biologique », le banaliseur [machine permettant de broyer et désinfecter] tourne à plein régime depuis début 2020. « On a travaillé tard le soir et le week-end pour prendre en charge tous les bacs », explique Sébastien Pigeot. Le responsable de l’unité DASRI a bien vu le nombre de déchets à traiter augmenter : « On est passés d’environ 600 bacs par mois à 800 dans les périodes les plus tendues », explique-t-il en poussant sur sa voix pour tenter de se faire comprendre dans le vacarme du banaliseur. Dans les conteneurs qu’il tracte à longueurs de journée, une grande partie des déchets de soins proviennent des hôpitaux des environs. Valorys se charge directement de la collecte des déchets de soins des  centres hospitaliers de Lannion, Guingamp, Paimpol, Tréguier et Begard plusieurs fois par semaine. « Au début de la pandémie, c’était la panique. On avait des Ehpad qui nous commandaient 100 bacs d’un seul coup en voyant le nombre de masques, de blouses et de tests qu’ils allaient devoir jeter », se souvient Dominique Liard, responsable logistique de l’entreprise de collecte Proserve.

Les chiffres, eux, corroborent le constat de Sébastien Pigeot ; entre 2019 et 2020, l’augmentation de la charge a été significative. Rien que pour les déchets provenant d’établissements publics de santé du Trégor, intégrant Ehpad et hôpitaux, plus de 1 000 bacs ont été traités en plus en 2020, passant de 7 429 à 8 492 conteneurs traités. Mais la simple collecte provenant des établissements publics ne représente qu’une partie du volume total. Aux 221 000 tonnes de collecte dans les établissements de soins en 2019, s’ajoutent les 244 000 tonnes venues de pharmaciens, patients en auto-traitement, laboratoires ou encore tatoueurs. L’année suivante, le total accusait une augmentation d’un peu plus de 20 tonnes avec 487 tonnes traitées.



Mobilisation générale et assouplissement des règles

Pour gérer ce volume supplémentaire, la simple augmentation du temps de travail n’a pas été une solution miracle. « Heureusement, les délais légaux de traitement ont été étendus », soupire le responsable de l’unité DASRI de Valorys, faisant référence à l’arrêté du ministère des solidarités et de la santé paru le 20 avril 2020. À la suite de la mise en application du texte, les producteurs de DASRI dont le stock n’excède pas cinq kilos par mois peuvent les garder six mois, au lieu de trois auparavant. Conséquence directe : le tsunami de bacs jaunes à venir s’est étalé dans le temps et a ainsi permis de préserver la filière.

Dans le même temps, de nouveaux acteurs ont été mandatés pour gérer la crise. « On a été mobilisé pour la collecte des DASRI venant de pharmacies, alors que notre coeur de métier, ce sont les patients qui suivent un traitement à domicile », note le responsable de collecte pour le secteur Ouest de l’éco-organisme DASTRI, qui observe un retour à la normale depuis quelques mois. « En ce moment, j’ai quelques bacs supplémentaires à traiter parce que l’incinérateur de Brest est en maintenance », précise Sébastien Pigeot. « Ils ont attendu l’après Covid pour faire ces travaux », imagine celui qui travaille chez Valorys depuis 11 ans. Il conclut : « Ça n’aurait pas été possible avant, c’était tendu chez tout le monde ».

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